Avec Sasjgenate, Cunnalhum transcende les contours du raw black metal atmosphérique pour accoucher d’un monde entier — un monde liquide, irradié, hallucinogène, où chaque seconde vibre d’une folie lucide et d’une beauté insensée. Projet emblématique de la scène expérimentale ukrainienne, habitué des sorties vertigineuses sur Musique Moléculaire, l’artiste signe ici un véritable magnum opus : une seule pièce-fleuve de près de 38 minutes, en constante mutation, en constante combustion.
Dans ce maelström hypnotique, le black metal devient langue chamanique, rituel de désintégration et de recréation. Les atmosphères — tantôt brumeuses, tantôt incandescentes — se déchirent en volutes techno-noise-IDM psychotropes, explosent en fragments shoegaze-prog-tech complètement détraqués, se lovent dans des nappes ambient opiacées, presque winter-synth, mais vues à travers le prisme d’un rêve malade. Les guitares deviennent nuages, les cris deviennent incantations : beauté et horreur s’y mêlent comme des amants perdus dans l’éther.
On y entend la transe du cosmos, le froissement d’un monde parallèle, la délicatesse d’un détail spectral noyé dans une mer de saturation. Chaque texture est ciselée comme une pierre philosophale sonore. Chaque changement de ton, de rythme, de densité, agit comme un portail vers un ailleurs vertigineux.
Un disque total. Un délire d’orfèvre. Une déclaration d’amour au chaos, à l’imaginaire, à la musique comme territoire mouvant. Sasjgenate ne se contente pas de sublimer le monde : il en invente d’autres — plus beaux, plus fous, plus libres.
-SIR KULIKTAVIKT
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With Sasjgenate, Cunnalhum dissolves the skeleton of atmospheric raw black metal into a shimmering hallucination — a fluid monolith of dreamlogic, noise, and transcendental fracture. Spanning nearly 38 minutes in a single serpentine movement, this work is less an album than a living delirium: burning, mutating, birthing and devouring itself in spectral waves.
Black metal becomes a vessel for implosion — scorched rituals spiraling into technoid vapors, IDM anomalies, and shoegaze-prog structures too warped to name. Ambient passages exhale narcotic fogs, vaporous and laced with winter ghosts. Schizoid rhythms unravel into trance states where time frays. Screams rise like ultraviolet light from deep within the body, rupturing the fabric of the audible.
Nothing is fixed. Everything flickers. Every moment folds into another world — molten, shimmering, half-imagined. This is not a record — it’s a threshold, a fever architecture, a map to nowhere drawn in sound. A portal opening inward.
Sasjgenate dreams with its teeth bared. It hums with the beauty of unreality. And from its core erupts not just music, but new and unstable dimensions.
-SIR KULIKTAVIKT