Aubade – Contours of Longing

Contours of Longing est le second chapitre de l’aventure Aubade, l’un des masques de l’artiste expérimental Angel B., dont les multiples identités – Narehate, Beholden, Kept Woman, Muybridge (pour ne nommer que celles là) – tracent les lignes mouvantes d’une œuvre en perpétuelle métamorphose.

Ici, la noise se transforme en labyrinthe kaléidoscopique : cut-ups à la Burroughs qui s’emmêlent comme des rubans magnétiques fous, éclats hauntologiques surgissant comme des fantômes de radios oubliées, débris sonores qui scintillent comme des miroirs brisés dans un rêve. Parfois, la matière se convulse en harsh noise psychédélique d’une intensité aveuglante ; parfois, elle se replie, devient subliminale, comme si l’on tendait l’oreille à une conversation venue d’une autre galaxie.

Avec Aubade, le noise n’est pas un mur, mais une matière vivante : un bruit qui se déchire, s’effiloche, se reconstruit. Un flux de textures abrasives et oniriques, où les réminiscences se diluent comme des polaroïds trempés dans l’acide.

On croit reconnaître une mélodie. Elle s’échappe. On pense saisir un motif. Il se défait aussitôt. Rien ne demeure, sinon l’impression d’avoir traversé un lieu à la fois familier et inexistant — un souvenir qui se réécrit de lui-même dans une langue fragmentée.

Écouter cet album, c’est comme visionner « L’Année dernière à Marienbad » sans personnages humains : les machines aux circuits brûlés y jouent les rôles principaux, dans un jardin électrifié dont l’électricité provient d’une dimension bancale. Des fragments de musiques d’époques qui n’ont jamais existé y résonnent, un passé imaginé qui rêve un futur impossible.

C’est un moteur d’hélicoptère en chair fondue pleurant des boulons de carpaccio mélancolique.
C’est un soleil d’acier qui brille au-dessus de nos crânes insectoïdes, tandis que les nuages se désagrègent en barbe-à-papa rôtie et filandreuse.
C’est une brume vermeille qui s’échappe des narines d’une statue grecque dont les angles se dissolvent dans l’air.

Les sons deviennent phrases sans mots, cicatrices de bande-magnétique, couloirs saturés de lumière noire.
C’est une procession d’images :
des reflets démembrés qui respirent,
un magnétophone mangé par ses propres bandes,
des nuages d’insectes qui écrivent l’air à coups d’ailes.

Puis les sons se désarticulent, se mordent, se chevauchent :
labyrinthe / écoulement / vrille d’éclats /
mémoire pliée sur elle-même /
ombres inversées respirant le vide.

Contours of Longing : un mirage sonore, une fracture de la réalité, un cut-up hanté où chaque écoute invente son propre gouffre.

-SIR KULIKTAVIKT

Contours of Longing is the second chapter in the ever-shifting adventure of Aubade, one of the many masks of experimental artist Angel B., whose myriad identities — Narehate, Beholden, Kept Woman, Muybridge (to name only a few) — sketch the trembling outlines of a body of work in perpetual metamorphosis.

Here, noise transforms into a kaleidoscopic labyrinth: Burroughs-style cut-ups tangled like deranged magnetic tapes, hauntological shards emerging like ghosts from forgotten radios, sonic debris glittering like shattered mirrors inside a dream. At times, the matter convulses into blinding psychedelic harsh noise; at others, it folds inward, becomes subliminal — as though one were eavesdropping on a conversation from another galaxy.

With Aubade, noise is no longer a wall but a living substance: a sound that tears, frays, recomposes itself. A flux of abrasive yet dream-drenched textures, where reminiscences dissolve like Polaroids submerged in acid.

You think you recognize a melody. It escapes. You believe you’ve grasped a pattern. It unravels instantly. Nothing remains, except the impression of having crossed a place both familiar and nonexistent — a memory rewriting itself in a fragmented tongue.

Listening to this album feels like watching Last Year at Marienbad stripped of human actors: machines with scorched circuits take the lead roles, within an electrified garden powered by crooked energy from another dimension. Fragments of musics from eras that never existed reverberate — an imagined past dreaming an impossible future.

It is a helicopter engine of molten flesh weeping bolts of melancholic carpaccio.
It is a steel sun glaring above our insectoid skulls, as clouds unravel into roasted, fibrous cotton candy.
It is a vermilion mist leaking from the nostrils of a Greek statue whose angles dissolve into the air.

The sounds become phrases without words, magnetic-tape scars, corridors saturated with black light.
It is a procession of images:
dismembered reflections that breathe,
a tape recorder devoured by its own reels,
clouds of insects writing the sky with their wings.

And then the sounds dislocate, gnash, overlap:
labyrinth / outflow / spiral of shards /
memory folding back onto itself /
inverted shadows breathing the void.

Contours of Longing: a sonic mirage, a fracture in reality, a haunted cut-up where every listen invents its own abyss.

-SIR KULIKTAVIKT 

Translation >>>